Dans une première partie, nous avons étudié l'Histoire dans les oeuvres de Miyazaki. Nous avons conclu que Miyazaki espérait un retour dans le passé où la Nature était encore magnifique mais commençait à être attaquée par les dérives de l'Homme et sa soif de conquête et de profits. Finalement, dans Princesse Mononoké, c'est la société actuelle industrielle qui est représentée par la forge d'Eboshi qui détruit la Nature.

A l'époque la Nature était presque intouchable, les Hommes vivaient en communion avec elle...



Mais les nouvelles activités industrielles commencèrent à ravager des lieux jusqu'alors sacrés.



 
Miyazaki est un grand traumatisé de Hiroshima et Nagazaki : dans Le Château dans le Ciel, il nous montre les dangers de la mégalomanie d'un homme, que rien ne peut arrêter. Il représente par cet homme la nation américaine, impérialiste, dominatrice et cruelle. Miyazaki garde même encore maintenant un certain mépris en vers les Américains qu'ils trouvent trop irrespectueux envers la Nature et envers les Hommes.
 

 
Dans une deuxième partie, nous nous sommes attardés sur la société japonaise, en quoi Miyazaki représentait ou pas celle-ci et pourquoi.

Miyazaki est un japonais très féministe : dans tous ses films, au moins un des protagonistes est une femme. Il lui donne en général une place qui peut plaire au spectateur de par son originalité ou par sa force de caractère : Yubaba, une vieille femme tyrannique avec ses employés et totalement "gaga" devant son gros bébé, Mononoké, une femme louve, Chihiro, une jeune fille innocente, Sheeta, une princesse qu'on veut déshériter, Nausicaä, une princesse pure et pacifique qui veut la paix entre l'Homme et la Nature, Eboshi, une femme forte mais généreuse, Lin, une "grande soeur" protectrice, Mei, une petite fille adorable, Ponyo, une petite rousse loin du physique qu'on imagine d'une sirène, Sophie, une jeune fille grand-mère avant l'heure, Gina, une femme séduisante et plein de charme, Fio, un garçon manqué très attirant, Lisa, une mère dynamique, et j'en passe ! 







Voici une interview où Miyazaki explique pourquoi il a choisi une femme comme protagoniste de son film Nausicaä et la Vallée du Vent :
Intervieweur : Nausicaä, le personnage principal, est une femme. Y a-t-il une raison particulière dans ce choix ?
Miyazaki : Eh bien, les hommes n'ont pas la cote ces temps-ci. Quand un homme tire avec une arme, on a l'impression qu'il tire juste parce que c'est son boulot et qu'il n'a pas d'autre alternative. Ca manque d'impact. Quand une femme emploie une arme, c'est tout à fait autre chose. Quand j'ai vu un film comme Gloria, je le ressens vraiment, ce n'est pas une fille, mais une femme d'âge mûr (Obasan) qui tient une arme comme une assiette. C'est vraiment stimulant. L'histoire d'un homme gagnant son indépendance est toujours dite de telle sorte (par des évenements) qu'il batte un opposant dans une bataille ou force son chemin malgré de difficiles situations. Mais dans le cas d'une femme, il faut ressentir, accepter ou aimer une telle action... Nausicaa n'est pas un personnage qui vient à bout d'un ennemi, mais qui le comprend ou l'accepte comme il est. Elle ne pense même pasà venger ses parents. Elle a une autre approche du monde. Un tel personnage est plus féminin que masculin. Si elle était un homme, son comportement s'avérerait trop étrange. Je pense que les hommes comptent plus sur les mots. Je crois que les femmes abordent les problèmes liés à l'environnement davantage par leurs sentiments.




On l'aura compris : Miyazaki aime la femme et la met en valeur, il la représente sous chacun des fantasmes de l'homme pour lui montrer que la société japonaise actuelle n'est pas acceptable.
En effet, dans celle-ci, la femme est très mal considérée : dans la vie, elle a deux choix, soit elle travaille et reste célibataire, soit elle se marie et a une famille, et elle reste à la maison ! Alors que l'homme, lui, peut se marier et travailler ! De plus, c'est le chef de famille et c'est incontestable : une femme qui protesterait se verrait humiliée par celui-ci ou au pire, battue ! Bien sûr, cette situation est de moins en moins vraie, puisque les Japonais s'occidentalisent et l'égalité des deux sexes est petit à petit  respectée. Cependant, il ne faut pas croire que dans les campagnes profondes la situation est prête à s'améliorer : beaucoup de familles vivent encore dans le respect des traditions, où la femme est l'"esclave" du mari, souvent tyrannique.

Miyazaki s'interesse aussi aux relations, aussi bien familiales que sociales. Quand il parle d'amour, Miyazaki met en scène des histoires impossibles mais pleines de tendresse et de passion. Les relations amoureuses ne sont pas physiques : à aucuns moments nous voyons Ashitaka embrasser San, ni Chihiro se jetter sur Haku. Mais la tendresse est bien là, à travers les mots, les gestes et les regards de ces personnages amoureux. Miyazaki nous emporte alors dans une relation à double sens, comme si l'un ne pouvait se passer de l'autre, un couple qui fonctionnerait comme un tout.




Quand Miyazaki parle de la famille, il la représente absente ou inutile. Miyazaki reste profondément marqué par la maladie de sa mère, et de son absence, et préfère ainsi nous montrer des relations très soudées entre deux ou trois personnes plutôt qu'une famille qui ne s'épanouit pas. Les scènes banales et anodines de ces familles qui souffrent par l'absence de quelqu'un deviennent terriblement touchantes pour un regard extérieur.
Pour Miyazaki, la famille est une force, un atout pour grandir et découvrir le monde.





On a aussi appris que Miyazaki "respectait" le cliché des mentalités japonaise. Les japonais sont souvent vus comme des personnes de raison, qui préfèrent réfléchir longuement avant d'agir. Chez Miyazaki, ce sont souvent les personnes âgées, les sages ou les mentor de nos héros préférés qui possèdent cette qualité. Ce sont ausi des personnes impulsives, et Miyazaki a tenté de redonner ce trait de caractère à ses personnages. D'ailleurs, toutes les femmes chez Miyazaki citées plus haut correspondent à cette idée! Les japonais ont aussi le sens de la justice, respectant ainsi leur prochain, courageux, fidèle, loyal... Mais comme tout être humain, ils ont aussi leurs défaults . Les japonais sont de vrais superstitieux : ils s'effraient pour pas grand chose, surtout en ce qui concerne la mort. Ils sont aussi très attirés par l'argent, le propre de la nature humaine, rancuniers, fiers...
Mais ce sont les défauts et les qualités de ces personnages qui les rendent humains et réalistes.


Miyazaki a beaucoup de tendresse pour les marginaux, les rejetés de la société. Les Japonais les verraient comme des gens infréquentables, inintéressants, Miyazaki les voient, au contraire, comme des personnes très importante dans la société, puisqu'elles ne sont pas comme tout le monde, dans un moule, elles ont un autre oeil sur le monde qui les différencie des autres. Elles en voient un peu les vices et les qualités comme nous spectateur. Miyazaki, en incrustant des rejetés dans son film, montre qu'en plus de ne pas respecter la Nature, la race humaine ne se respecte pas elle-même, puisqu'elle s'auto-divise en clans.
Miyazaki veut nous donner une leçon de tolérance.






Dans une troisième et dernière partie, nous avons observé le rapport entre l'Homme et la Nature dans l'oeuvre de Miyazaki et s'il correspond à la situation actuelle au Japon.


Une grande partie de ce rapport, de ce lien, est relatif à la spiritualité. En effet, Miyazaki est un fervent shintoïste qui défend ses croyances à travers ses oeuvres. Il laisse d'ailleurs de nombeux petits détails à ce sujet. De nos jours, le shintoïsme est plus un mode de vie qu'une religion. On ne voue plus un culte pour les kami, mais l'on respecte encore quelques traditions, comme les matsuri, ces fêtes communales qui rendent hommage aux divinités les plus populaires, ou les visites en famille le dimanche après-midi au sanctuaire shinto le plus proche de chez soi.






Ce qui plaît à Miyazaki dans cette religion? Le fait qu'elle accorde une grande place à la nature. Et si les décors naturels et idylliques signent ces plus grandes oeuvres, ce n'est pas un hasard. Le shinto, c'est avant tout une alliance entre la nature et les hommes : les divintés, appelées kami, apportent félicité et bonheur aux hommes uniquement s'ils les respectent. En prenant soin de la nature qui l'entoure, l'homme s'octroîe les bonnes faveurs des dieux. Et dès que l'homme commence à maltraiter cette nature, à l'abîmer ou à la détruire pour ses besoins personnels, la nature se révolte. C'est le chème qui entoure Princesse Mononoke.



 
 
Miyazaki représente tout le temps une Nature cassée en présence de l'Homme sauf lorsque l'histoire se déroule en des temps anciens. En effet, pour lui, si l'Homme ne fait rien pour changer et s'améliorer, la race humaine est vouée à la disparition. Il rêve d'un jour où la Nature reprendra le dessus sur toutes les bâtisses modernes et que l'économie chûtera à cause de cela : ce sera un chaos écologique, mais pour lui, une utopie, un rêve réalisé. Il décrit un progrès qui détruit la nature et qui ne laisse aucune chance à celle-ci de résister : pour lui, c'est une injustice, il faut se battre à arme égale. Il nous prévient aussi du fait que la faune mondiale va disparaître, ce qui est vrai, si nous ne faisons rien, or, qui dit plus d'animaux, dit plus de nourriture, dit plus d'Homme. L'Homme s'auto-condamne donc à mourir à travers son désir d'avancée technologique. De plus, Miyazaki représente l'Homme totalement indifférent (sauf les héros, comme Ashitaka, Mononoké etc.) au sort de la Nature et donc au sien : il représente les animaux et autres créatures plus intelligentes que l'Homme.
 

Voici Tokyo à l'heure actuelle : où sont passés les grands cerisiers en fleur, qui ont fait la renommée internationale de la tradition japonaise ?


 
Miyazaki souhaite un retour dans le passé : c'est pour cela qu'il a situé son film Princesse Mononoké pendant l'ère Muromachi : l'industrialisation commençait à apparaître et la Nature était encore merveilleusement verte.
Bien sûr, il sait qu'une telle chose n'est pas réalisable, c'est pour cela qu'il veut donner l'envie aux Japonais des villes, habitués au goudron et à l'acier, de partir vers la campagne (comme le professeur dans Mon Voisin Totoro) ou du moins de faire attention à leur comportement qui pourraient nuire à la Nature.

Un soir au Kinkaku-ji
 





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Miyazaki est un réalisateur à première vue ambiguë.
D'un côté dans ses films, il prône l'anti-manichéisme : ses personnages ne sont jamais "méchants", mais ont leur part de doute, de désespoir et de gentillesse. Les héros valeureux, eux par contre, ont toujours très très peu de défauts : c'est le cas d'Ashitaka, irréprochable en tous points et en plus amoureux ! Miyazaki est persuadé que l'Homme est bon, malgré ces défauts.
Mais d'un autre côté, il dénigre l'Homme et sa façon d'agir avec la Nature.

On peut en conclure que Miyazaki est un humaniste : il est déçu de ce que fait l'Homme avec son potentiel, il le gâche. Pour lui, l'Homme pourrait vivre en communion avec la Nature sans avoir besoin de l'asservir : l'Homme donnerait à la Nature, et la Nature donnerait à l'Homme, comme un échange éternel entre deux mondes qui auraient besoin de l'autre pour survivre.

 






































































 
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